(Géographie ancienne) les anciens géographes parlent de plus d'une ville de ce nom.

I. Strabon distingue trois villes ainsi nommées, 1°. la capitale de l'île de Samos ; 2°. une Samos du Péloponnèse en Messénie ; 3°. une Samos du Péloponnèse en Elide, qui depuis longtemps était détruite.

II. Les martyrologes d'Adon et d'Usuard, font mention d'une Samos d'Asie dans la Lycie ; ce n'était apparemment qu'un bourg ou un village.

III. S. Thomas d'Aquin, fort mal-habîle en géographie, met une Samos en Calabre, où, dit-il, Pythagore prit naissance. Mais aucun géographe n'a connu cette Samos de Calabre ; et si Pythagore est né à Samos comme nous le croyons sur le témoignage de Diogène Laèrce et d'autres écrivains, c'est dans l'île de Samos en Ionie que ce philosophe vit le jour. (D.J.)

SAMOS, l'île de (Géographie ancienne) île de la mer Méditerranée, sur la côte de l'Asie mineure, entre l'Ionie à l'orient, et l'île d'Icaria, aujourd'hui Nicarie, au couchant, au midi du golfe d'Ephise. Elle est séparée de l'Anatolie par le détroit de Mycale, qui prend ce nom de l'ancienne ville de Mycalessus, ou de la montagne Mycale, qui est en terre ferme le long de ce détroit, auquel on donne environ trois lieues de large.

L'île de Samos avait été premièrement appelée Parthenia, ensuite Driusa, puis Anthemusa ; on l'a aussi nommée Cyparissia, Parthenoarusa, et Stephane. Pline lui donne 87 milles de circuit, et Isidore pour faire le compte rond, en met 100.

Cette île est toute escarpée, et c'est ce qui lui a fait donner le nom de Samos, car selon Constantin Porphirogenete, les anciens grecs appelaient Samos les lieux fort élevés. La grande chaîne de montagnes qui traversent Samos dans sa longueur, se nommait Ampelos. Sa partie occidentale qui fond dans la mer du côté d'Icaria, retenait le même nom ; elle s'appelait aussi Cantharium et Cerceteus, au rapport de Strabon, l. XIV. et l. X. c'est cette roche qui fait le cap de Samos, et que les grecs modernes nomment Kerki.

Du temps que la Grèce florissait, l'île de Samos était fort peuplée, cultivée, riche, brillante, et d'une fertilité que les anciens ne se lassaient point d'admirer. On lui applique ce proverbe : les poules y ont du lait : . C'est dans ce charmant séjour qu'Antoine se rendit d'Ephèse avec Cléopatre pour y prendre part aux divertissements de cette île voluptueuse, pendant que leurs armées sur terre et sur mer acheveraient de se former contre celle d'Octave, avant la bataille d'Actium. Cléopatre ne pouvait choisir un lieu plus propre à distraire Antoine et à l'amuser. Samos était alors le centre des plaisirs ; tout y respirait la molle oisiveté ; les richesses de la nature y refleurissaient deux fois chaque année ; les figues et les raisins, les roses et les plus belles fleurs y renaissaient presque aussi-tôt qu'on les cueillait. In eâ insulâ, dit Athenée, bis anno ficos, uvas, mala, rosas, nasci narrat Aethlius. Pline parle des grenades de cette ile, dont les unes avaient les grains rouges et les autres blancs ; le gibier était meilleur que dans aucun autre pays. Les routes publiques et les rues des villes étaient ombragées de ces saules de l'Ombrie, aussi agréables par leur feuillage que par leur verdure.

Tous les jours se passaient à Samos en fêtes galantes ; les insulaires allaient ensemble au temple de Junon, et s'y rendaient en habillements pompeux, ayant par-dessous des tuniques blanches comme la neige, et trainantes jusqu'à terre ; leurs cheveux ajustés, et négligemment épars sur leurs épaules, noués avec des tresses d'or, voltigeaient au gré des zéphirs. Couronnés de fleurs, et parés de tous les ornements les mieux assortis, ils formaient une marche solennelle, terminée par une milice revêtue de boucliers resplendissants : ut nexi fuerunt, contendebant in Junonis templum, speciosis vestibus amicti, terraeque latè niveis tunicis solum radebant ; comae cincinni insidebant crinibus quos vittis aureis nexos, ventus quatiebat ; pompam claudebant scutati bellatores.

Il serait difficîle d'exprimer quel était dans cette île l'excès du luxe et le dérèglement des mœurs. Plutarque dit qu'il y avait un lieu nommé les jardins de Samos, Samiorum flores, où les habitants se rendaient pour y goûter tous les plaisirs que pouvait imaginer l'obscénité la plus outrée : Samosos plusquàm credibîle est luxu corruptos !

Ces insulaires voluptueux ravis de voir Antoine et Cléopatre applaudir à leurs fêtes, à leurs jeux et à leurs plaisirs, auraient souhaité qu'ils ne les quittassent jamais, et méditaient tous les jours de nouveaux moyens de les retenir. Les rois et les peuples des environs, comme tributaires de l'empire, envoyaient à Samos les choses nécessaires pour le service de la guerre prochaine, et en même temps pour contribuer à divertir le triumvir de Rome et la reine d'Alexandrie, tout ce qu'ils croyaient de plus propre à produire cet effet. Antoine ne recevait pas seulement toutes sortes de secours et de munitions ; mais tout ce qu'il y avait de plus célèbre en comédiens, en musiciens et en danseurs, venaient s'offrir à ses désirs ; ainsi pendant que par toute la terre on gémissait à la vue des préparatifs d'une guerre sanglante, on ne parlait dans Samos que de théâtres, que de fêtes brillantes ; et l'on disait hautement : que feront-ils après la victoire, puisqu'ils en font tant avant le combat ?

Telle était alors l'île de Samos ; elle avait plusieurs excellents ports, et entr'autres celui qu'on nomme aujourd'hui le port de Vati, qui peut contenir une armée navale, et sur lequel on avait bâti une ville, dont les ruines paraissent d'une grande étendue. La capitale de l'île tenait depuis le port de Tigani, qui est à trois milles de Cora, jusqu'à la rivière Imbrasus, qui coule à cinq cent pas des ruines du temple de Junon. Vitruve prétend que cette capitale et les treize villes d'Ionie, étaient l'ouvrage d'Ion l'athénien.

Quoique Samos soit entièrement détruite, M. de Tournefort dit qu'on peut encore la diviser en haute et basse. La ville haute occupait la montagne au nord, et la basse régnait depuis le port Tigani jusque au cap de Junon. Ce port célèbre est en croissant, et sa corne gauche est cette fameuse jetée, qu'Hérodote, l. III. comptait parmi les trois merveilles de Samos. Cette jetée était haute de 20 taises, et avançait plus de 250 pas dans la mer. Un ouvrage si rare dans ce temps-là, prouve l'application des Samiens à la marine : aussi reçurent-ils à bras ouverts Aminoclès corinthien, le plus habîle constructeur de vaisseaux, qui leur en fit quatre, environ trois cent ans avant la fin de la guerre du Péloponnèse. Ce furent les Samiens qui conduisirent Batus à Cyrène, plus de 600 ans avant Jesus-Christ ; enfin si nous croyons Pline, ils inventèrent des vaisseaux propres à transporter la cavalerie.

A l'égard de la largeur de la ville, elle occupait une partie de cette belle plaine, qui vient depuis Cora jusqu'à la mer, et du côté du midi, et du côté du couchant, jusqu'à la rivière.

La montagne était autrefois percée par des cavernes taillées au marteau, ouvrage d'Eupaline, architecte de Mégare, et qui passait pour une des merveilles de la Grèce. " Les Samiens, dit Hérodote, percèrent une montagne de 150 taises de haut, et pratiquèrent dans cette ouverture, qui avait 875 pas de longueur, un canal de 20 coudées de profondeur, sur trois pieds de largeur, pour conduire à leur ville l'eau d'une belle source. " On voit encore l'entrée de cette ouverture ; le reste s'est comblé depuis ce temps-là. Au sortir de ce merveilleux canal, l'eau passait sur l'aqueduc qui traverse le vallon, et se rendait à la ville par un conduit.

Les mines de fer ne manquaient pas dans Samos, car la plupart des terres sont d'une couleur de rouille. Selon Aulugelle, les Samiens furent les inventeurs de la poterie, et celle de cette île était recherchée par les Romains : Samia vasa etiamnùm in esculentis laudantur, dit Pline ; Samos fournissait en médecine deux sortes de terre blanche, outre la pierre Samienne, qui servait encore à polir l'or.

Toutes les montagnes de l'île étaient remplies de marbre blanc, et leurs tombeaux n'étaient que de marbre. Une partie des murailles de la ville qui avaient dix pieds d'épaisseur et même douze en quelques endroits, étaient aussi bâties de gros quartiers de marbre, taillés la plupart à tablettes ou facettes, comme l'on taille les diamants. Nous n'avons rien Ve de plus superbe dans tout le Levant, dit Tournefort : l'entre-deux était de maçonnerie ; mais les tours qui les défendaient étaient toutes de marbre, et avaient leurs fausses-portes pour y jeter des soldats dans le besoin.

Les maisons de la ville de Samos bâties aussi de marbre en amphithéâtre du côté de la mer, offraient le coup d'oeil d'une ville agréable et opulente ; delà vient qu'Horace l'appelle Concinna. Les portiques étaient magnifiques, et son théâtre encore davantage. Quoiqu'on en ait emporté les matériaux pour bâtir Cora, on trouve encore dans les environs des colonnes de marbre abattues, les unes rondes et les autres à pans.

En descendant de la place du théâtre vers la mer, on ne voit, dit Tournefort, dans les champs que colonnes cassées, et quartiers de marbre : la plupart des colonnes sont ou cannelées, ou à pans ; quelques-unes rondes, d'autres cannelées sur les côtés, avec une plate-bande sur le devant et sur le derrière, comme celle du frontispice du temple d'Apollon à Délos. Il y a aussi plusieurs autres colonnes à différents profils sur quelques terres voisines ; elles sont encore disposées en rond ou en carré, ce qui fait conjecturer qu'elles ont servi à des temples ou à des portiques. On en voit de même en plusieurs endroits de l'ile.

Enfin Junon protectrice de Samos, y avait un temple rempli de tant de richesses, que dans peu de temps, il ne s'y trouva plus de place pour les tableaux et pour les statues. Hérodote Samien, cité dans Athenée, Deipn. l. XV, comme l'auteur d'un livre qui traitait de toutes les curiosités de Samos, assure que ce temple était l'ouvrage des Cariens et des nymphes, car les Cariens ont été possesseurs de cette ile. Nous parlerons de ce magnifique édifice, à l'article des temples de la Grèce.

Junon est représentée dans quelques médailles de Samos, avec des espèces de bracelets ; ou des broches, comme l'a conjecturé M. Spanheim, chargées d'un croissant. Tristan a donné le type d'une médaille des Samiens, représentant cette déesse ayant la gorge assez découverte. Elle est vêtue d'une tunique qui descend sur ses pieds, avec une ceinture assez serrée ; et le repli que la tunique fait sur elle-même, forme une espèce de tablier ; le voîle pend du haut de la tête ; et tombe jusqu'au bas de la tunique, comme font les écharpes de nos dames. Le revers d'une médaille qui est dans le cabinet du roi, représente ce voîle tout déployé, qui fait des angles sur les mains, un angle sur la tête, et un autre angle sur les talons.

On a d'autres médailles de Samos, où Junon a la gorge couverte d'une espèce de camail, sous lequel pend une tunique, dont la ceinture est posée en sautoir, comme si l'on voulait marquer qu'elle eut été déliée. La tête de ces dernières médailles, est couronnée d'un cerceau qui s'appuie sur les deux épaules, et qui soutient au bout de son arc une manière d'ornement pointu par le bas, évasé par le haut, comme une pyramide renversée.

Sur d'autres médailles de Samos, on voit une espèce de panier qui sert de coiffure à la déesse, vêtue du reste à-peu-près, comme nos religieux bénédictins. La coiffure des femmes turques approche fort de celle de Junon, et les fait paraitre de belle taille ; cette déesse avait sans-doute inventé ces ornements de tête si avantageux, et que les fontanges ont depuis imités.

M. l'Abbé de Camps avait un beau médaillon de Maximin, au revers duquel est le temple de Samos, avec Junon en habit de nôces, et deux paons à ses pieds, parce qu'on les élevait autour du temple de cette déesse, comme des oiseaux qui lui étaient consacrés.

De toutes les antiquités de Samos, il ne nous reste que des médailles, et les noms de plusieurs hommes célèbres dont elle a été la patrie ; mais je ne parlerai que d'Aristarque, de Choerile, de Pythagore, de Melissus et de Conon.

Aristarque a fleuri un peu avant le temps d'Archimède, qui comme on sait perdit la vie, lorsque Syracuse fut prise par les Romains, l'an 1 de la 142e olympiade. Vitruve nous apprend qu'il inventa l'une des espèces d'horloge solaire. Il est aussi un des premiers qui ont soutenu que la terre tourne sur son centre, et qu'elle décrit tous les ans un cercle autour du soleil. Il fut à ce sujet accusé juridiquement d'impiété par Cléanthe, disciple et successeur de Zénon, pour avait violé le respect dû à Vesta, et pour avoir troublé son repos ; c'est-à-dire, comme l'explique Plutarque, pour avoir ôté la terre du centre de l'univers, et pour l'avoir fait tourner autour du soleil.

Le zèle de Cléanthe aurait dû être suspect à ceux qui connaissaient le fond du système stoïcien : car ce système ramenait tout à une fatalité, et à une espèce d'hylozoïsme ou de matérialisme, peu différent du dogme de Spinosa.

Au reste, l'accusation d'Aristarque doit moins nous étonner, que le traitement fait dans le dernier siècle au célèbre Galilée : cet homme respectable, auquel l'astronomie, la physique, et la géométrie ont tant d'obligation, se vit contraint d'assurer publiquement comme une hérésie, l'opinion du mouvement de la terre : on le condamna même à la prison pour un temps illimité ; et ce fait est un de ceux qui nous montrent qu'en vieillissant, le monde ne devient pas plus sage.

L'attachement des Athéniens au dogme de l'immobilité de la terre, était une suite de l'idée qu'ils s'étaient formée de l'univers, dans le temps qu'ils étaient encore à demi barbares : incapables de concevoir que la terre put se soutenir à la même place sans un point d'appui, ils se l'étaient représentée comme une montagne, dont le pied ou les racines s'étendent à l'infini, dans l'immensité de l'espace. Le sommet de cette montagne arrondi en forme de borne, était le lieu de la demeure des hommes : les astres faisaient leur évolution au-dessus, et autour de ce sommet : il était nuit, lorsque la partie la plus élevée nous cachait le soleil. Xénophane, Anaximene, et quelques autres philosophes, qui feignaient d'être scrupuleusement attachés à l'opinion populaire, avaient grand soin de faire observer que dans leur système, les astres tournaient autour, mais non au-dessous de la terre.

Il ne nous reste des ouvrages d'Aristarque, que le traité de la grandeur et de la distance du soleil et de la lune, traduit en latin et commenté par Frideric Commandin ; il parut avec les explications de Pappus, l'an 1572. M. Wallis le publia en grec, avec la version de Commandin, l'an 1688, et il l'a inséré au III. tome de ses œuvres mathématiques, imprimées à Oxford l'an 1699. Au reste il ne faut pas confondre le philosophe Aristarque natif de Samos, avec Aristarque grammairien qui nâquit dans l'île de Samothrace, et dont nous parlerons sous ce mot.

Choerile, poète de Samos, était contemporain de Panyasis et d'Hérodote, avec lequel il fut en étroite liaison ; il écrivit en vers la victoire des Grecs sur Xerxès. Son poème plut si fort aux Athéniens, qu'ils donnèrent au poète un statère d'or pour chaque vers, (douze livres de notre monnaie), et qu'ils ordonnèrent de plus que cet ouvrage serait chanté publiquement, ainsi que l'on chantait les poèmes d'Homère : il mourut chez Archélaus, roi de Macédoine. Il ne faut pas confondre le Choerîle de Samos, avec le Choerîle Athénien, qui florissait vers la 64e olympiade, et à qui quelques-uns attribuent l'invention des masques, et des habits de théâtre. L'histoire parle encore d'un troisième Choerile, assez mauvais poète, qui suivit Alexandre en Asie, et qui chanta ses conquêtes ; ce prince avait coutume de dire qu'il aimerait mieux être le Thersite d'Homère, que l'Achille de Choerilus.

Cependant au milieu des palmes les plus belles

Le vainqueur généreux du Granique et d'Arbelles,

Cultivant les talents, honorant le savoir ;

Et de Choerîle même excusant la manie,

Au défaut du génie,

Récompensait en lui le désir d'en avoir.

Le premier des anciens sages qui ait pris le nom de philosophe, est le célèbre Pythagoras, fils de Mnésarque. Il se rendit tellement illustre par sa science et par sa vertu, que plusieurs pays se sont attribués l'honneur de son lieu natal. Mais la plus commune opinion lui donne pour patrie l'île de Samos. Il est encore plus difficîle de concilier ensemble les savants sur l'époque de sa naissance, et la durée de sa vie ; et la multiplicité des sentiments est trop grande, et leur opposition est trop marquée.

Il florissait du temps du roi Numa, à suivre une ancienne tradition adoptée par quelques écrivains postérieurs, et rejetée par la plupart des autres : tradition qui semblait pourtant avoir pour elle, et des témoignages d'auteurs de la première antiquité, et des monuments découverts sous le janicule, dans le tombeau même de Numa. Pythagore, au contraire ne vint en Italie que sous le règne de Servius Tullius, selon Tite-Live ; ou sous le règne de Tarquin le superbe, au rapport de Cicéron ; ou même après l'expulsion des rois et sous les premiers consuls, si l'on en croit Solin.

Pline a placé le temps de ce philosophe vers la xlij. olympiade, Denys d'Halicarnasse après la l. la chronique paschale d'Alexandrie à la ljv. Diogène Laèrce à la lx. Diodore de Sicîle à la lxj. Tatien, Clément d'Alexandrie et quelques autres à la lxij. Il serait inutîle de grossir davantage la liste des contrariétés des anciens auteurs sur ce point de chronologie : contrariétés qui se trouvent encore augmentées plutôt qu'éclaircies par quatre vies que nous avons de Pythagore, écrites dans la basse antiquité ; l'une par Diogène Laèrce ; l'autre par Porphyre ; la troisième par Jamblique ; et la quatrième par un anonyme, dont Photius nous a laissé l'extrait dans sa bibliothèque.

On a pourtant Ve dans ces derniers temps quelques doctes anglais, Stanley, Dodwel, Sloyd et Bentley, entreprendre de déterminer les années précises du philosophe Pythagore. Ils ont marqué l'année d'avant l'ère chrétienne qu'ils ont cru répondre à sa naissance ; Stanley l'an 566, Dodwel l'an 569, Sloyd l'an 586, et Bentley l'an 605. De ces quatre opinions, la dernière est celle qui fait remonter le plus haut l'âge de Pythagore, et il y a des chronologistes qui lui donnent une antiquité encore plus grande.

Selon M. Freret, la naissance de Pythagore n'a pas pu précéder l'an 600, quoiqu'elle puisse avoir été moins ancienne. C'est entre les années 573 et 532 que Cicéron, Diodore de Sicile, Denys d'Halicarnasse, Tite-Live, Aulugelle, Clément Alexandrin, Diogène Laèrce, Porphyre, Jamblique, etc. placent le temps auquel Pythagore a fleuri, celui de ses voyages dans l'Orient et dans l'Egypte, et celui de sa retraite en Italie. On prétend qu'il mourut à Métaponte, du-moins Cicéron n'eut point de soin plus pressant que d'y visiter le lieu où l'on croyait de son temps que ce philosophe avait fini sa vie.

On lui attribue plusieurs belles découvertes en Astronomie, en Géométrie, et dans les autres parties des Mathématiques. Plutarque lui donne l'honneur d'avoir observé le premier l'obliquitté du zodiaque, honneur que d'autres prétendent devoir être dû à Anaximandre. Selon Pline, Pythagore de Samos est le premier qui s'aperçut que la planète de Vénus est la même que l'étoîle du matin, appelée Lucifer, et que l'étoîle du soir nommée Hesperus ou Vesper. On prétend aussi qu'il a trouvé la propriété du triangle en général et celle du triangle rectangle. Que ces deux découvertes lui soient dû.s ou non, on sait qu'il n'est pas possible sans elles d'avancer d'un pas assuré dans les Mathématiques, ou dumoins dans les parties de cette science qui ont l'étendue pour objet.

Il rejetait le sentiment en musique, et ne considérait que la proportion harmonique. Ayant en vue d'établir une constance invariable dans les arts en général et dans la musique en particulier, il essaya d'en soustraire les préceptes aux témoignages et aux rapports infidèles des sens pour les assujettir aux seuls jugements de la raison.

Ce philosophe, conformément à ce dessein, voulut que les consonnances musicales, loin d'être soumises au jugement de l'oreille (qu'il regardait comme une mesure arbitraire et trop peu certaine), ne se reglassent qu'en vertu des seules proportions des nombres qui sont toujours les mêmes. Ainsi, comme dans l'octave le nombre des vibrations de la corde la plus aigue était précisément le double de celles de la plus grave, il en concluait que cette consonnance était en raison double, ou de 2 à 1 ; &, en suivant toujours le même principe, que la quinte était en raison sesquialtère, ou de 3 à 2 ; la quarte, en raison sesquitierce, ou de 4 à 3 ; et le ton en raison sesquioctave, ou de 9 à 8. Ainsi dans son système, le ton qui faisait la différence de la quarte à la quinte, ne pouvait se partager en deux demi-tons égaux ; et par conséquent la quarte avait d'étendue un peu moins de deux tons et demi, la quinte moins de trois tons et demi, l'octave moins de six tons, et ainsi des autres accords contre ce qu'établissaient là-dessus les Aristoxéniens, en suivant le seul rapport des sens.

Il est étonnant que ce grand personnage ait proposé ses préceptes de morale sous le voîle des énigmes. Ce voîle était si épais, que les interpretes y ont trouvé autant de sens mystiques qu'il leur a plu.

Quant à ce qui regarde sa philosophie, voyez ITALIQUE, secte, et PYTHAGORICIENS.

Melissus vivait vers la lxxxiv. olympiade, c'est-à-dire vers l'an 444 avant Jesus-Christ, disciple de Parmenide d'Elée, il en suivit les principes ; mais à la Philosophie, il joignit la connaissance de la marine, et obtint dans sa patrie la charge d'amiral, avec des privilèges particuliers.

Conon mathématicien et astronome, fleurissait vers la cxxx. olympiade. Il mourut avant Archimède son ami, qui l'estimait beaucoup, lui communiquait ses écrits et lui envoyait des problèmes. Il inventa une sorte de volute qui différait de celle de Dinostrate ; mais comme Archimède en exposa plus clairement les propriétés, il fit oublier le nom de l'inventeur, car on l'a nommée non pas la volute de Conon, mais la volute d'Archimède. Nous ne devons pas douter des connaissances astronomiques de Conon, Catulle lui-même, épigr. 65. les a décrites en beaux vers à l'entrée de son poème sur la chevelure de Bérenice, sœur et femme de Ptolomée Evergetes ; voici le commencement de sa description poétique.

Omnia qui magni dispexit lumina mundi,

Qui stellarum ortus comperit, atque obitus :

Flammeus ut rapidi solis nitor obscuretur,

Ut cedant certis sidera temporibus,

Ut triviam furtim sub Latmia Saxa relegans

Dulcis amor gyro devocet aèrio :

Idem me ille Conon coelesti in lumine vidit

E Bereniceo vertice caesariem

Fulgentem clarè....

(D.J.)

SAMOS, l'île de, (Géographie moderne) île de l'Archipel, sur la côte de l'Anatolie, au midi du golfe d'Ephese. Il ne s'agira dans cet article que de décrire cette île d'après Tournefort, c'est-à-dire telle qu'elle est de nos jours. Ce savant voyageur en a donné le plan.

L'île de Samos est éloignée de Nicaria de 18 milles de cap en cap, et de 25 milles de Scalanova. On ne compte aujourd'hui dans cette île que dix à douze mille habitants presque tous grecs ; ils ont un évêque qui l'est aussi de Nicaria, et qui réside à Cora. Les Turcs y tiennent seulement un cadi et un vaivode, pour exiger la taille réelle.

Les Samiens ne ressemblent pas à ceux qui vivaient du temps de Cléopatre ; car ils n'ont plus de fêtes, de théâtres et de jeux pour les amuser. Les femmes sont mal-propres, et ne prennent de linge blanc qu'une fois le mois. Leur habit consiste en un doliman à la turque avec une coèffe rouge, bordée d'une sesse jaune ou blanche qui leur tombe sur le dos, de même que leurs cheveux, qui le plus souvent sont partagés en deux tresses, au bout desquelles pend quelquefois un trousseau de petites plaques de cuivre blanchi ou d'argent bas, car on n'en trouve gueres de bon aloi dans ce pays-là. On y recueille néanmoins beaucoup de grain et de fruits ; les raisins muscats y sont admirables, et le vin en serait délicieux, si l'on savait le faire ; les figues y sont blanches, trois ou quatre fois plus grosses que celles de Marseille, mais moins délicates ; la soie de cette île est fort belle, ainsi que le miel et la cire. Pour la scammonée de Samos, elle ne vaut guère, et il est surprenant que du temps de Dioscoride on la préférât à celle de Syrie. L'île est pleine de gibier excellent, et les perdrix y sont en prodigieuse quantité.

La ville de Samos, autrefois capitale de l'ile, est entièrement détruite. Environ à cinq cent pas de la mer, et presque à pareille distance de la rivière Imbrassus vers le cap de Cora, sont les ruines du fameux temple de Junon la samienne, ou la protectrice de Samos.

A onze milles des ruines de ce temple est un grand couvent de la Vierge, situé à mi - côte de montagnes agréables, couvertes de chênes verts, de pins à pignons, de pins sauvages, de philaria et d'adrachné.

Samos ayant été saccagée et dépeuplée après la paix de Constantinople, fut donnée par l'empereur Selim au capitan Bacha Ochialt, lequel y fit passer divers peuples de Grèce pour en cultiver les terres. Depuis la mort de cet amiral, le revenu de Samos a été affecté à une mosquée qu'il avait fait bâtir à Tophana, l'un des fauxbourgs de Constantinople.

Voilà l'histoire de cette ile. J'en dirais davantage, si j'avais pu trouver la description que Joseph Georgirene, évêque de Samos, en a fait en grec vulgaire, et qui a été traduite en anglais ; mais je n'ai pu en découvrir aucun exemplaire, et cet ouvrage manque à la bibliothèque du roi. Latit. 37d. (D.J.)

SAMOS, terre de, (Histoire naturelle, Minéralogie) c'est une terre ou marne très-blanche qui se trouvait dans l'île de Samos, on la regardait comme un grand remède contre les hémorrhagies, les diarrhées, et extérieurement contre les inflammations. On formait aussi des vases avec une terre de Samos, mais il y a apparence que ce n'était point avec celle qui vient d'être décrite, puisqu'une marne n'est point propre à faire de la poterie. M. Tournefort croit que c'était avec une terre bolaire d'un rouge foncé qui se trouve dans la même ile, et surtout près de Bavonda.

Il y avait encore une terre que Dioscoride a appelée aster samius, que M. Hill croit être une marne, d'un gris de cendre mêlée de talc. Voyez d'Acosta natural history of fossils.